Pour la deuxième édition du programme de résidence sonore du musée du quai Branly – Jacques Chirac, le jury a retenu le projet de l’artiste Aïda Adilbek.

Résidence sonore 2023 : Aïda Adilbek
Projet lauréat : « Ton dernier repos sera bercé par des chants » (“… öleñmen jer qoïnyna kirer deneñ”)
Contenu
En écho à son engagement et soutien en faveur du patrimoine immatériel des cultures qu’il représente et de la création contemporaine, le musée a mis en place au début de l’année 2022 un programme de résidence sonore. Le dispositif prévoit une dotation à hauteur de 8000 euros et le financement de la production d’une œuvre sonore conçue en lien avec les collections, enjeux et thématiques du musée. Ce programme d’aide à la création permet d’accueillir chaque année un artiste originaire de l’un des quatre continents représentés dans les collections du musée (Afrique, Asie, Océanie, Amériques) pour la réalisation d’un projet artistique unique. À l’issue de l’appel à projets, un jury international de personnalités du monde de la création sonore et audiovisuelle a désigné l’artiste plasticienne kazakhe Aïda Adilbek lauréate de cette deuxième édition
L’artiste est ainsi invitée à produire un projet original en cohérence avec sa trajectoire artistique, en lien avec les collections matérielles et immatérielles du musée.
La résidence s’effectue cette année encore en partenariat avec Le Fresnoy – Studio national des arts contemporains à Tourcoing, qui l’accueillera pour deux sessions de travail et l’accompagnera dans la production de son œuvre sonore. Sa création
sera présentée au public en mars 2024 et intégrera les collections du musée. Présidé par Emmanuel Kasarhérou, président du musée du quai Branly – Jacques Chirac, le jury est composé de :
- Blick Bassy (artiste),
- Anne Lafont (historienne de l’art),
- Youmna Saba (artiste lauréate de la 1ère édition du programme de résidence sonore),
- Éric de Visscher (musicologue et commissaire d’exposition),
- François Bonenfant (coordinateur cinéma et arts visuels au Fresnoy – Studio national des arts contemporains),
- Anne-Solène Rolland (directrice du Patrimoine et des Collections au musée du quai Branly – Jacques Chirac),
- Christine Drouin (directrice du Développement Culturel au musée du quai Branly – Jacques Chirac),
- Anne Behr (responsable du service de l’auditorium au musée du quai Branly – Jacques Chirac)
- et d’Élodie Saget (responsable des fonds sonores et audiovisuels au musée du quai Branly – Jacques Chirac).
Cette résidence s’inscrit dans le projet « Musée Résonnant » qui vise à transformer l’expérience sonore du visiteur sur le plateau des Collections permanentes du musée. Le son, envisagé comme une autre façon d’appréhender les œuvres, au- delà de la stricte perception visuelle, permet notamment une meilleure inclusivité des publics et l’intégration de la multiplication des approches, de la pluralité des voix autour des objets présentés. Il est au cœur des réflexions sur le musée de demain.
Aussi, conscient de l’importance que revêt aujourd’hui le médium son dans la régénération du patrimoine immatériel, le musée du quai Branly – Jacques Chirac souhaite faire entendre des artistes du 21e siècle dont l’héritage culturel se déploie dans un monde contemporain et dialogue avec lui. Il s’engage ainsi dans une démarche à long terme de soutien et de valorisation de la création contemporaine en art sonore
Les résidence sonores : un programme d’aide à la création

LE PROJET LAURÉAT
« ton dernier repos sera bercé par des chants »
La culture kazakhe, et particulièrement la culture des Kazakhs des steppes, a été profondément impactée par le totalitarisme culturel soviétique. Une tradition poétique et musicale abondante rythmait la vie de ce peuple nomade, du berceau à la tombe. Aïda Adilbek propose de réhabiliter les coutumes orales du peuple kazakh et de ramener à la vie ces histoires et ces âmes trop longtemps ignorées. « ton dernier repos sera bercé par des chants » / “... öleñmen jer qoïnyna kirer deneñ”* est une œuvre immersive et intimiste, qui propose de se plonger dans un processus de transformation et de renaissance, à partir de chants rituels kazakhs qui accompagnent la naissance et la mort d’une personne. L’œuvre fera entendre la voix des Kazakhs sous la forme d’une installation multicanal où tous les sons parlés, chantés, récités, formeront une histoire mélodique du cycle de la vie.
À partir des chants joqtau jyry, mélodie de deuil chantée un an après la mort d’un proche, et shilde jyry, chanté lors du rituel du shildehana 40 jours après la naissance d’un enfant**, Aïda Adilbek créera une œuvre sonore et lumineuse de 30 mn, qui mènera le public du crépuscule à une nouvelle aurore, en traversant la nuit des steppes. La mort étant considérée comme une étape dans un processus de transformation et d’entrée dans le second royaume, l’œuvre débutera par le deuil, qui sera suivi d’une naissance et d’un renouveau. Cette trajectoire immobile sera d’une grande douceur, avec des transitions fluides d’un état à un autre. La pièce sonore mêlera des extraits d’archives conservées en France et au Kazakhstan, des récitations d’anciens enregistrées sur le terrain spécifiquement pour le projet, des chants recréés par une chorale d’aînés, et des compositions originales par de jeunes musiciens kazakhs sur des instruments traditionnels d’Asie centrale.

À partir des chants joqtau jyry, mélodie de deuil chantée un an après la mort d’un proche, et shilde jyry, chanté lors du rituel du shildehana 40 jours après la naissance d’un enfant**, Aïda Adilbek créera une œuvre sonore et lumineuse de 30 mn, qui mènera le public du crépuscule à une nouvelle aurore, en traversant la nuit des steppes. La mort étant considérée comme une étape dans un processus de transformation et d’entrée dans le second royaume, l’œuvre débutera par le deuil, qui sera suivi d’une naissance et d’un renouveau. Cette trajectoire immobile sera d’une grande douceur, avec des transitions fluides d’un état à un autre. La pièce sonore mêlera des extraits d’archives conservées en France et au Kazakhstan, des récitations d’anciens enregistrées sur le terrain spécifiquement pour le projet, des chants recréés par une chorale d’aînés, et des compositions originales par de jeunes musiciens kazakhs sur des instruments traditionnels d’Asie centrale.
Les coulisses de la résidence sonore 2023
Consultation au cabinet des fonds précieux
© musée du quai Branly - Jacques Chirac, photo Julien Brachhammer
BIOGRAPHIE
Aïda Adilbek
Aïda Adilbek (née en 1994) a grandi à Almaty, au Kazakhstan. En 2016, elle obtient son diplôme en étude critique de l’histoire de l’art à l’Académie nationale d’art Jurgenov Kazakh. L’année de son intégration au département d’histoire de l’art, celui-ci décide de fermer son programme en langue russe au profit d’un programme en langue kazakhe. Aïda Adilbek se rend compte, à travers ces nouveaux enseignements, de l’absence de connaissances concernant l’art visuel kazakh pré- soviétique. Son apprentissage des arts appliqués, qui sont, tant sur le plan pratique que sur le plan conceptuel, au centre des cultures nomades, façonne sa vision de l’art. Après avoir obtenu son diplôme, Aïda Adilbek intègre une école de geste artistique (ШХЖ), à Almaty. Elle y rencontre de nombreux amis et collègues avec qui elle fonde en 2020 le collectif exclusivement féminin MATA. Durant ces trois dernières années, le collectif a pu mener des projets engagés, artistiquement et socialement, comme le semi-festival MATA WEEK ou encore le podcast RADIOMATA. La même année, elle obtient une maîtrise en Beaux-Arts à la Goldsmiths University of London (Londres, Royaume-Uni). Aujourd’hui, son activité rassemble pratiques artistiques, conservation et recherches théoriques. En plus de donner des conférences, Aïda Adilbek organise des événements et des expositions pour d’autres artistes. En 2021, elle est invitée à faire partie du collectif DAVRA, un groupe de recherche lancé par Saodat Ismailova, une cinéaste et artiste ouzbèke, dans le cadre de son projet « Chilltan », présenté en 2022 à la 15e édition de la Documenta à Kassel, en Allemagne. Cette expérience l’a incitée à approfondir son intérêt pour les supports audiovisuels de narration, performatifs et durables. Pour le projet de la Documenta, elle réalise une installation sonore performative intitulée « Chilltan Suv » (L’eau des Chilltans) et son premier court métrage documentaire « Alaqan », qui suit sa grand- mère et sa mère dans leurs tâches ménagères quotidiennes.
Le Fresnoy - Studio national des arts contemporains, situé à Tourcoing, est un pôle d’excellence dans l’enseignement artistique, audiovisuel et numérique français, dont le programme pédagogique met en avant le croisement des disciplines et la production d’œuvres à échelle réelle avec des moyens de production professionnels. La direction artistique de l’école, pilotée par Alain Fleischer, encourage par ailleurs le passage des outils, supports et langages traditionnels de la modernité (cinéma, photographie, vidéo, création sonore et musicale) à l’univers des technologies émergentes et des arts numériques. Chaque année, l’établissement accueille des artistes qui comptent parmi les plus renommés de la scène internationale, toutes disciplines confondues. À titre d’exemple, on peut citer Jean-Luc Godard, Anne Teresa de Keersmaeker, Sarkis, Gary Hill, Choï, Charles Sandison, Ryoji Ikeda et plus récemment Ben Russell ou Laure Prouvost. Ces créateurs accompagnent les projets des jeunes artistes étudiant au Fresnoy tout en réalisant eux-mêmes un projet personnel.
LE FRESNOY - STUDIO NATIONAL DES ARTS CONTEMPORAINS


