L'esthétique du geste technique
Mai 2013
Les chants dont les prisonniers texans rythment leurs gestes de travail ont-ils quelque chose à voir avec le geste fluide du luthier taillant un violon, celui de la scarificatrice bwaba ciselant les chairs ou celui de l’Homo erectus taillant un biface ? Resserrant la vieille question des rapports entre le beau, l’utile et le nécessaire, ce dossier choisit de privilégier celle de l’esthétique du geste technique. En quoi un tel geste peut-il être jugé beau, et cette beauté tient-elle à des caractéristiques tangibles – régularité, rythmicité, économie… – ou à des traits plus impalpables ? La question est envisagée ici à partir de la distinction opérée par Hannah Arendt entre travail et œuvre. Le travail – l’ensemble des tâches répétitives nécessitées par la survie quotidienne – est parfois sublimé par des chants ou des chorégraphies qui embellissent le labeur et allègent sa pénibilité. Tandis que l’élaboration d’une œuvre – c’est-à-dire la création d’un objet qui viendra s’ajouter durablement au monde – peut être esthétisée par un geste technique hautement maîtrisé. De Boas à Leroi-Gourhan, des auteurs ont lié la valeur esthétique d’un objet à la perfection de sa réalisation technique mais les contributeurs de ce dossier, qui s’étend de la Préhistoire au XXIe siècle, et de l’Europe à l’Afrique, montrent que le geste technique est une composante à part entière du jeu social dans lequel il s’insère et que sa beauté ne se réduit pas à la maîtrise de règles formelles.
Sommaire
Dossier : L'esthétique du geste technique
Coordonné par Sophie A. de Beaune
- Introduction : Esthétique du geste technique, par Sophie A. de Beaune
- De la beauté du geste technique en préhistoire, par Sophie A. de Beaune
- Du geste technique à la geste musicale, par Marianne Lemaire
- De l'adresse. Remarques sur l'esthétique des gestes du luthier, par Baptiste Buob
- À main levée. La scarification comme œuvre, par Michèle Coquet
- Arts de faire, arts de vivre. Chefs-d'œuvre inconnus des compagnons du tour de France, par Nicolas Adell
Études et essais
- Dessins chamaniques et espace virtuel dans le chamanisme khakasse, par Charles Stépanoff
- Le Nouvel An chinois à Paris. Sur les scènes de l'altérité, par Jing Wang
Notes de lecture
- « Comment Homo devint faber », par Françoise Sabban
- « L'Europe des esprits ou la fascination de l'occulte, 1750-1950 », par Giordana Charuty
Chronique scientifique
Comptes rendus
DESCRIPTIF
- 232 pages au format 20x27 cm
- 100 illustrations
- ISBN : 9 782357 440494
- 20 €