Projet Éclat Métallique

Comprendre, préserver et questionner l’éclat des métaux au musée

Contenu

Comment redonner vie à la brillance des objets métalliques sans trahir leur histoire ? Le projet "Éclat Métallique" interroge la matérialité des métaux, leur patine, leur symbolique et les choix éthiques liés à leur restauration. Une réflexion qui mêle savoirs-faires techniques et histoire des collections, dans le respect des cultures d’origine.

Sommaire

 

Qu’est-ce que ce projet ?

Le Projet Éclat Métallique est une initiative interdisciplinaire qui réunit pôle Conservation, Restauration, Analyses (PCRA) du musée, les responsables de collections, un collectif de restauratrices spécialisées dans le traitement des métaux, et un étudiant en master 2 de conservation-restauration. Ces spécialistes, réunis, étudient l'état de surface des objets métalliques exposés sur le plateau des collections (dont certains présentés au public depuis l’ouverture du musée.)

Jusqu’à présent, le musée du quai Branly – Jacques Chirac s’était surtout concentré sur des matériaux organiques aux surfaces complexes, mêlant patines rituelles, traces d’usage et polychromies. Pour la première fois, une attention particulière est portée à la surface des métaux, à leur brillance, leur ternissement et à ce qu’ils révèlent de l’histoire des objets.

Qu’est-ce que l’éclat métallique ?

L’éclat métallique désigne la brillance d’un objet en métal. Mais doit-il forcément briller ? Qu’est-ce qui le fait briller ? Et que signifie ce miroitement ? Et comment se forme le ternissement ? A-t-il une valeur esthétique ou historique ? Aide-t-il à la conservation ?

Ces questions ne sont pas anodines : elles nécessitent une réflexion pluridisciplinaire mêlant histoire des collections, études techniques et analyses scientifiques. Interroger la materialité d’un objet permet aussi de questionner ce qu’il représente : la brillance comme le ternissement ne vont pas de soi.

Quel est Le rôle du pôle Conservation, restauration et analyses (PCRA)  ?

Redonner son éclat à un objet métallique implique souvent de retirer les produits de corrosion qui ternissent la surface. Une intervention irréversible, qui modifie la perception de l’œuvre. Seul-e un-e professionnel-le de la conservation-restauration spécialisé-e dans les métaux peut réaliser ce travail, car il nécessite des connaissances scientifiques, un savoir-faire technique, et le respect strict de la déontologie actuell en conservation-restauration.

Une surface peut être complexe et comporter dorures, vernis, éléments de décors… Chaque objet donc est évalué individuellement pour définir un protocole adapté. Le PCRA complète également ses compétences internes avec celle d’une équipe de spécialistes menée par Clémence Chalvidal, et fait appel à un étudiant en conservation-restauration, Imran Pieri, qui dédie son mémoire de fin d’étude à ce sujet.

Une recherche sur la symbolique de l’éclat

Au-delà de la technique, le projet souhaite développer la recherche d’information concernant la production de ces objets d'apparat et la considération qui est apportée à l’éclat métallique au sein des communautés traditionnelles.
Une première étude de terrain a été menée auprès de la communauté Amazigh au Maroc, mais d’autres recherches sont prévues pour couvrir la diversité des territoires et des traditions.

Parures amazighes

Les bijoux amazighs sont bien plus que de simples ornements. Réalisés principalement en argent, ils jouent un rôle essentiel dans la vie sociale et spirituelle des communautés berbères d’Afrique du Nord. Ils marquent les grands moments de l’existence : mariage, maternité, transmission familiale, fêtes et rituels.

Leur richesse ne réside pas seulement dans la matière ou le savoir-faire, mais dans les motifs qu’ils portent. Gravures, formes géométriques, éléments suspendus : chaque détail véhicule une signification. Ces parures protègent, racontent l’histoire d’une lignée et ancrent les individus qui les portent – principalement des femmes – au sein de leurs communautés.

Objets de mémoire et de transmission, les bijoux circulent de génération en génération, souvent accompagnés de récits. Présentés aujourd’hui dans les vitrines du musée, ils témoignent d’un patrimoine à la fois unique et hybride, croisant les cultures sahariennes, marocaines, algériennes, tunisiennes et égyptiennes. Le travail de conservation-restauration va permettre de redécouvrir tout l’éclat d’un art profondément lié à la terre, aux rites et à l’identité.

Focus : le trésor Insulinde

L’éclat des parures de l’Insulinde était l’une de leur composante essentielle. Ces bijoux portés par les hommes, les femmes, ou les maîtres des rituels portent en eux une richesse symbolique qui participe au bon fonctionnement du groupe et plus largement à celui de l’univers, à travers les mythes. Toutes les sociétés de l’archipel indonésien ont été travaillées par la nécessité d’équilibrer et de nourrir les polarités opposées : l’ombre et la lumière, la matière souterraine et froide de la terre et celle lumineuse et chaude,  du soleil, l’intérieur et l’extérieur, l’ouvert et le clôt, le plein et le vide, le dur et le souple, le silence et le discours, l’immobile et l’actif, l’ensemble ayant partie liée au masculin et au féminin.

La réponse à cette quête d’équilibre s’exprime, entre autres, par la création d’objets investis d’une valeur dont la signification symbolique se révèle dans leur circulation et leur destination. Aujourd’hui, après vingt ans d’exposition, les trois vitrines dédiées aux parures de l’Insulinde bénéficient d’une campagne exceptionnelle d’intervention de conservation-restauration pour redonner aux objets leur éclat initial.